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Abdelaziz Rahabi : Trump réintroduit la « diplomatie transactionnelle »

Abdelaziz Rahabi : Trump réintroduit la « diplomatie transactionnelle »

Source : instagram officiel de Donald Trump
Donald Trump

Le nouveau président américain Donald Trump veut concrétiser ce que le gouvernement israélien a échoué à faire au début de la guerre de Gaza : déplacer la population de l’enclave palestinienne vers les pays arabes limitrophes.

Donald Trump en a fait la proposition formelle à la Jordanie et à l’Égypte. Pour le diplomate algérien Abdelaziz Rahabi, il s’agit du retour de « la diplomatie transactionnelle » où « tout se quantifie financièrement », comme au début des colonies.

 Trump et le retour de l’esprit colonial

Au début de l’agression israélienne contre la bande de Gaza, le gouvernement  de Benyamin Netanyahou avait beaucoup insisté auprès de l’Égypte pour accepter que les quelque 2,4 millions d’habitants de l’enclave s’installent comme réfugiés dans la péninsule du Sinaï. L’argument des Israéliens était qu’il fallait éloigner les civils du théâtre de la guerre.

Le Caire avait toutefois compris qu’un déplacement de la population palestinienne serait irréversible et a catégoriquement refusé la proposition. L’objectif du gouvernement israélien est de vider la bande de de Gaza de sa population et ouvrir la voie à sa colonisation définitive.

Les responsables égyptiens avaient expliqué que la présence de centaines de milliers de Palestiniens dans le Sinaï débouchera inéluctablement sur un affrontement entre l’Egypte et Israël qui pourra être tenté par des incursions en territoire égyptien contre la résistance palestinienne. Un tel scénario s’est produit dans le passé avec le Liban qui abrite un nombre important de réfugiés palestiniens.

Après 14 mois de guerre qui a fait près de 50 000 morts et plus de 100 000 blessés, l’idée n’est pas abandonnée. Elle est reformulée par le président Américain Donald Trump dès son retour à la Maison Blanche, le 20 janvier dernier.

Le retour de Trump a coïncidé avec la conclusion d’un accord de cessez-le-feu et d’échange de prisonniers entre le Hamas et Israël. Il avait menacé de graves retombées si un tel accord n’était pas conclu avant son investiture officielle, le 20 janvier.

La trêve a permis à des centaines de milliers de Palestiniens de rentrer dans leurs maisons, ou ce qu’il en reste. Le monde a découvert, choqué, les images de colonnes humaines marchant au milieu des ruines. Gaza est presque entièrement détruite.

Donald Trump et le retour de « la diplomatie transactionnelle »

Pour Trump, la solution est de construire de nouvelles habitations pour les survivants dans les pays riverains. Il en a fait la proposition à l’Égypte et à la Jordanie, presque sous forme d’injonction.

"J’espère qu’ils (les Egyptiens) prendront (des Gazaouis). Nous les avons beaucoup aidés, je suis sûr qu’ils nous aideront (…) Je pense que le roi de Jordanie le fera aussi », a-t-il dit.

L’idée de Donald Trump est une volte-face spectaculaire par rapport à la position qui était jusque-là celle des États-Unis.

Bien qu’ayant soutenu sans condition le gouvernement de Tel-Aviv dans la guerre contre Gaza, Washington a toujours plaidé pour la solution à deux États. Le projet de Trump signifie l’enterrement de cette perspective. Pour le moment, la réponse de l’Égypte et de la Jordanie est un niet catégorique.

Projet de Trump de « nettoyer » Gaza : le niet de l’Egypte et de la Jordanie

"L’expulsion et le déplacement des Palestiniens de leur terre est une injustice à laquelle nous ne prendrons pas part », a répondu Abdel Fattah al-Sissi, le président Égyptien.

Le roi Abdallah de Jordanie a lui aussi réitéré « la position ferme » de son pays, à savoir que les Palestiniens doivent rester chez eux, « sur leurs terres ». Il n’est toutefois pas exclu que Trump revienne à la charge et passe aux menaces, face à ces deux pays du Moyen-Orient qui comptent parmi les plus grands récipiendaires de l’aide américaine.

« Le président Trump déclare qu’il faut expulser les Palestiniens de Gaza où ils vivent depuis des millénaires, et soumet l’Egypte et la Jordanie à l’intimidation et au chantage de l’aide américaine », écrit ce jeudi 30 janvier sur X le diplomate et ancien ministre algérien Abdelaziz Rahabi.

Pour lui, même si le discours du président américain « n’a d’effet réel que sur sa propre sphère d’influence occidentale », il réintroduit « la diplomatie transactionnelle dans laquelle tout se quantifie financièrement comme au début des colonies et du libéralisme économique du 19ème siècle ».

Si les cycles de la vie des nations s’inscrivent dans la longue durée, celui que propose Trump s’inscrit dans « les termes du marché spot, le temps d’un mandat présidentiel », estime l’ancien ambassadeur d’Algérie en Espagne.

Face à cette situation, Abdelaziz Rahabi estime que l’Algérie doit « consolider les acquis en matière de souveraineté, d’avoir une économie performante, moderne et innovante et de raffermir les liens entre l’Etat et peuple ». « Cela passe inéluctablement par la bonne gouvernance et le strict respect des libertés individuelles et collectives », conclut-il.

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