Qu’il y ait des lobbies pro-Maroc en France, c’est un secret de polichinelle. L’existence de ces lobbies au rôle néfaste sur la relation franco-algérienne est évoquée par Benjamin Stora.
C’est la toute première fois qu’une personnalité française de ce rang parle publiquement des lobbies marocains.
Benjamin Stora est interviewé par la chaîne publique algérienne Al24 News. Il a évidemment été question de la crise en cours entre l’Algérie et la France.
« Il s’agit d’une rupture de confiance qui existe entre les deux pays, c’est ça le grand problème », a dit l’historien, estimant que, pour rétablir cette confiance, Alger et Paris pourrait revenir « à la question de la mémoire, la question de la réparation et l’application d’un certain nombre de recommandations » qu’il avait lui-même préconisées dans le rapport qu’il a rédigé en 2021 à la demande du président Emmanuel Macron.
« Il y a aussi des questions très politiques, c’est-à-dire la question de Sahara occidental, ce n’est pas simplement la question de la mémoire. Parce que la question politique est venue percuter le travail sur la mémoire qui a commencé », a-t-il ajouté.
Stora évoque en France « une fraction qui a toujours été en faveur de la monarchie marocaine »
C’est le revirement de la France sur la question du Sahara occidental qui a causé la crise en cours. Le 31 juillet dernier, le président Macron a reconnu la « souveraineté marocaine » sur le Sahara occidental en apportant l’appui de la France au plan d’autonomie marocain comme « seule base » pour parvenir à un règlement du conflit. Alger a procédé dès le lendemain au retrait de son ambassadeur à Paris. Plus de six mois après, le poste est toujours vacant.
Emmanuel Macron est soupçonné d’avoir agi sous la pression de la droite et de l’extrême-droite dont plusieurs représentants, comme Éric Ciotti et Rachida Dati, ont appelé à plusieurs reprises ces dernières années à reconnaître « la souveraineté marocaine » sur le territoire occupé et à « rééquilibrer » la politique maghrébine de la France, jugée alors favorable à l’Algérie plutôt qu’au Maroc.
Benjamin Stora n’écarte des pressions des lobbies pro-Maroc
La question a été posée à Benjamin Stora. « Je pense qu’il y a au sein de la société française une fraction qui a toujours été en faveur de la monarchie marocaine depuis très longtemps, qui a toujours manifesté ce penchant sur la question du Sahara en particulier », a répondu l’historien spécialiste de l’histoire de l’Algérie. Plus clairement, Stora n’exclut pas qu’il y ait eu des « pressions ».
« Je pense qu’il y a eu des pressions. Je pense qu’il y a des groupes qui existent, qui fonctionnent et qui sont très influents à l’intérieur de la société française à travers des chaînes de télévision, des médias qui sont très puissants en France aujourd’hui, beaucoup plus qu’auparavant », a-t-il appuyé.