Après l’affaire Boualem Sansal, c’est celle que d’un autre Boualem qui risque de donner le coup de grâce à le fil ténu qui maintient encore les relations entre l’Algérie et la France, alors que le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau agite le spectre de nouvelles représailles.
Le deuxième Boualem est le prénom d’un influenceur algérien connu sur les réseaux sociaux sous le pseudonyme Doualemn.
Il a été expulsé jeudi 9 janvier sur arrêté du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, avant même qu’il ne soit jugé pour les faits qui lui sont reprochés par les autorités françaises.
Arrivé en Algérie à bord d’un vol commercial, il a été renvoyé en France par les autorités algériennes, selon les médias français. Les raisons de ce renvoi ne sont pas connues. En France, la décision des autorités de renvoyer Doualemn suscite de vives réactions dans le camp de la droite et de l’extrême droite.
Bruno Retailleau : « l’Algérie cherche à humilier la France »
Au gouvernement, c’est le ministre Retailleau qui a pris la parole pour dire que les relations entre la France et l’Algérie ont « atteint un seuil extrêmement inquiétant ». Sans filtre, Bruno Retailleau a accusé l’Algérie de chercher « à humilier la France ».
Des déclarations inédites de la part d’un ministre français de l’Intérieur qui surviennent moins d’une semaine, après les propos du président Emmanuel Macron sur l’affaire Boualem Sansal.
Lundi, le président français a estimé que l’Algérie se « déshonore » en « empêchant un homme gravement malade de se soigner ». Il a demandé aux autorités algériennes de libérer « instamment » l’écrivain franco-algérien qu’il a qualifié de « combattant de la liberté ».
En réponse, le ministère des Affaires étrangères a qualifié les propos de Macron d’ingérence dans une affaire interne, et ajouté l’affaire Boualem Sansal relève « essentiellement d’une mise en cause de l’intégrité territoriale du pays, un délit punissable par la loi algérienne ».
Ce vendredi, le ministre Retailleau qui a entamé son règne à Place Beauvau, avec des attaques contre l’Algérie sur la question migratoire, a repris la même rhétorique en évoquant l’affaire Sansal.
Algérie – France : la crise inédite en trois actes
« Est-ce qu’un grand pays, est-ce qu’un grand peuple, peut s’honorer de maintenir en détention, pour de mauvaises raisons, quelqu’un qui est malade et qui est âgé ? », s’est-il interrogé.
Face aux deux refus de l’Algérie, à savoir celui de la libération de Boualem Sansal et de l’accueil de l’influenceur Doualem, Bruno Retailleau agite le spectre de nouvelles représailles. « La France ne peut pas supporter cette situation », a-t-il tranché, en affirmant que « tous les moyens qui peuvent être utilisés contre l’Algérie » doivent être « évalués », sans donner de détails, mais la menace est claire.
« Il y a un éventail de possibilités, que je ne détaillerai pas ici, qui doivent être étudiées au plus haut niveau, gouvernement et président de la République », a ajouté Bruno Retailleau dont les déclarations illustrent l’état de dégradation avancée des relations entre l’Algérie et la France.
Cette crise a éclaté le 31 juillet dernier, avec la décision du président Macron de reconnaître la « marocanité » du Sahara occidental. Le jour même, l’Algérie a retiré son ambassadeur à Paris et depuis sa plus importante représentation diplomatique à l’étranger est sans chef.
La crise s’est aggravée avec l’arrestation, la mi-novembre à Alger, de Boualem Sansal qui a été placé sous mandat de dépôt et poursuivi pour atteinte à l’intégrité du territoire national.
Dans un entretien au média d’extrême droite Frontières en septembre dernier, l’écrivain algérien naturalisé français en 2024, a dit qu’une partie de l’Algérie appartenait historiquement au Maroc.
Le troisième et dernier acte – en attendant d’autres, s’est déroulé au début de ce mois de janvier, avec l’arrestation de plusieurs influenceurs algériens basés en France pour de graves dérapages sur les réseaux sociaux.
Doualemn qui fait partie des influenceurs arrêtés, a été expulsé jeudi 9 janvier vers l’Algérie qui a son tour l’a renvoyé en France.