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Algérie – France : plus que jamais au bord de la rupture !

Algérie – France : plus que jamais au bord de la rupture !

Par luzitanija / Adobe Stock
France - Algérie

L’Algérie a démenti ce jeudi 7 novembre les informations soutenant qu’elle a bloqué le commerce avec la France. Ce qui n’enlève rien à la crise inédite en cours entre les deux pays, provoquée par l’alignement de Paris sur les thèses marocaines dans le dossier sahraoui et aggravée par les agissements d’une extrême-droite française qui ne veut décidément pas d’une relation apaisée avec l’Algérie. Les canaux de communication entre les deux pays sont pratiquement rompus.

Le fait qu’une telle mesure extrême fasse l’objet d’une rumeur persistante est un signe qui ne trompe pas sur le degré de dégradation de la relation entre la France et l’Algérie. 

Les deux pays, qui ont pourtant connu bien des crises depuis l’indépendance et plus particulièrement ces trois dernières années, n’ont jamais été aussi proches de la rupture. 

La relation est réduite au strict minimum depuis le rappel de l’ambassadeur d’Algérie en France fin juillet dernier. Le poste est vacant depuis quatre mois. 

Devant se rendre cet automne en France, le président Abdelmadjid Tebboune a tout annulé. « Je n’irai pas à Canossa », a-t-il signifié le 5 octobre dernier. 

Le dernier dossier qui pouvait encore donner un motif de rapprochement, celui de la mémoire, est mis entre parenthèses. Les « gestes » annoncés « au goutte à goutte » par Emmanuel Macron ne sont pas jugés suffisants pour réparer le mal fait ces dernières années à la relation bilatérale.

La reconnaissance, le 1er novembre, par le président français de l’assassinat du héros national algérien Larbi Ben M’hidi par « des militaires français » a été accueillie avec une indifférence froide à Alger. 

Il ne restait que le blocage du commerce pour que la coupure soit quasi-totale avant celle, formelle, de la rupture des relations diplomatiques.

La rumeur a été relayée, comme dénoncé par les services du Premier ministre algérien, par Xavier Driencourt, l’ancien ambassadeur en Algérie au discours proche du courant extrémiste. 

L’Algérie et la France au bord de la rupture

La rupture totale avait été évoquée pour la première fois en mai 2023 par le même Driencourt en suggérant la révocation de l’accord franco-algérien de 1968 sur l’immigration. Le diplomate avait plaidé pour une telle mesure tout en se disant conscient qu’elle pourrait déboucher sur la situation extrême de rupture des relations diplomatiques. 

Le fait que le nom de Xavier Driencourt soit associé à cet épisode n’étonne pas. C’est en fait tout le courant extrémiste en France qui pousse au pourrissement au grand jour, avec des attaques inacceptables contre l’Algérie, son histoire et sa communauté en France. 

Le même courant est derrière le rapprochement avec le Maroc et le renoncement au projet de bâtir une relation d’exception et « un partenariat renouvelé » avec l’Algérie. L’extrême-droite, la droite dure et les nostalgiques de l’Algérie française ont tout fait ces dernières années pour parvenir à une telle situation.

Emmanuel Macron a fini par céder à leur pression pour « rééquilibrer » sa politique maghrébine. Le 30 juillet dernier, le président français a franchi le pas de la reconnaissance de « la souveraineté marocaine » sur le Sahara occidental. Un engagement qu’il est allé réitérer le 28 octobre à Rabat. 

La crise en cours entre Alger et Paris dépasse toutefois le seul cadre de la question sahraouie. Elle est le reflet du changement qui s’opère dans la classe politique française vis-à-vis de l’Algérie avec la montée inexorable de l’extrême-droite dans les urnes et dans la société. Elle est aussi la résultante d’un choix géopolitique fait par Emmanuel Macron dans le cadre de calculs allant au-delà de la réconciliation avec « l’allié historique » marocain. 

L’éventualité d’un blocage des échanges commerciaux a inquiété dans les deux pays et ce n’est pas sans raison. Outre le poids de la dimension humaine de la relation bilatérale, l’Algérie est la France sont des partenaires économiques très importants et très utiles l’un pour l’autre. 

Leurs échanges s’étaient établis à 5,4 milliards d’euros au premier semestre de l’année en cours, selon les chiffres des Douanes françaises repris en septembre dernier par Business France Algérie, le service économique de l’ambassade de France à Alger. Sur l’année, ce sont donc près de 11 milliards d’euros que s’échangent les opérateurs algériens et français. Ce qui n’est pas rien.

La balance commerciale est en faveur de l’Algérie avec, pendant la même période, trois milliards d’euros de pétrole et de gaz exportés vers la France et 2,4 milliards de dollars d’importations de ce pays, constituées essentiellement de produits industriels. 

Les Douanes françaises avaient fait état d’une reprise sensible des exportations vers l’Algérie après les nombreuses crises politiques de ces dernières années entre les deux capitales. 

Le blocage du commerce entre les deux pays aurait donc comme conséquence directe et immédiate de causer un manque à gagner d’environ 5 milliards d’euros par an pour les entreprises françaises.

Sans compter l’impact considérable sur les groupes français installés en Algérie comme les banques dont Société Générale et BNP Paribas, Danone, TotalEnergies, Renault qui dépendent en grande de la France pour les matières premières, les pièces de rechange, les services…

De nombreuses entreprises algériennes dépendent aussi du commerce avec la France d’où elles importent des pièces de rechange, des matières premières, des équipements ainsi que des services indispensables à leur fonctionnement. En plus du gaz et du pétrole, elles y exportent aussi quelques produits alimentaires qui sont très prisés par la diaspora algérienne installée en France.

Début octobre dernier, les fournisseurs français ont été écartés d’un appel d’offres lancé par l’Algérie pour l’acquisition de 500 000 tonnes de blé. L’Office algérien des céréales, l’OAIC, a toutefois précisé que le blé français a été écarté pour « des critères techniques spécifiques, en fonction des besoins industriels particuliers à cette période ». 

Bien qu’une source des milieux d’affaires français en Algérie avait assuré à TSA fin octobre que, pour le moment, aucune instruction, du moins écrite, n’avait été émise par les autorités algériennes pour cesser de traiter avec les opérateurs français, des inquiétudes ont été exprimées quant aux retombées économiques du rapprochement de la France avec le Maroc au détriment de la relation avec l’Algérie. 

« J’espère que cette visite ne se traduira pas par une dégradation forte de nos relations avec l’Algérie. Parce que si on perd avec l’Algérie ce qu’on gagne avec le Maroc, on sera passé à côté du sujet », a mis en garde l’ancien haut fonctionnaire Patrick Stefanini à la veille du voyage d’Emmanuel Macron à Rabat, le 28 octobre. 

Emmanuel Macron a en effet obtenu pour les entreprises françaises 10 milliards d’euros de contrats au Maroc. Tout en mettant en péril la relation avec un partenaire important sur tous les plans.

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