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Algérie – Italie : la lune de miel vue de France

Algérie – Italie : la lune de miel vue de France

Par Oleksii / Adobe Stock

La lune de miel entre l’Algérie et l’Italie ne peut échapper au prisme français au moment où rien ne va plus entre Alger et Paris.

La visite entamée en Algérie lundi 3 mars par le ministre italien des Affaires étrangères Antonio Tajani a été l’occasion de réitérer l’entente parfaite entre les deux pays, portée par un soubassement politique et historique favorable et un partenariat économique qui se renforce d’année en année.

Le premier enseignement à en tirer dans le contexte de la forte brouille franco-algérienne est que la France devra défaire seule, du moins sans l’Italie, l’écheveau de sa crise avec l’Algérie.

Grand fournisseur de gaz à l’Italie et à l’Espagne, et bientôt d’hydrogène vert à l’Allemagne, l’Algérie se pose de plus en plus en partenaire énergétique et stratégique crucial et incontournable pour l’Europe.

Insinuant que le renforcement de la coopération algéro-italienne se fait au détriment de la France, certains médias français soulignent que cette entente survient au moment où la relation entre Paris et Alger se dégrade.

« Alors que Paris et Alger s’enfoncent dans une crise diplomatique dont on ne voit pas le bout, l’Italie et l’Algérie n’ont de cesse d’afficher leur parfaite concorde », écrit Le Monde à propos du déplacement à Alger du chef de la diplomatie italienne.

Évoquant le contexte global du recul de la France sur le continent africain, le journal français met l’accent sur la vision d’une femme, la présidente du Conseil Giorgia Meloni qui, dès son arrivée au pouvoir à Rome en 2022, « a eu un regard critique sur l’action de la France sur le continent africain ».

Issue pourtant du même courant, Meloni s’est démarquée de l’extrême-droite française qui cultive les rancœurs du passé.

L’Italienne a, au contraire, fait appel à ce qui, dans le passé commun, pouvait rapprocher. Son coup d’éclat a été de lancer un plan de développement pour la rive sud de la Méditerranée et l’Afrique et de le baptiser du nom d’Enrico Mattei qui résume par son parcours « l’appétit pour les hydrocarbures, la grandeur nationale italienne et la lutte contre le colonialisme français », écrit Le Monde. Mattei (1909-1962) est le fondateur de la compagnie ENI et fut un grand ami de la révolution algérienne.

Algérie : égarement français et perspicacité italienne

Ayant déjà mis en garde que la France n’est pas seule sur le marché algérien et africain et que d’autres « alliés, mais concurrents », dont l’Italie, sont à l’affût, le sénateur français d’origine algérienne Akli Mellouli est revenu à la charge mardi soir à l’occasion d’un débat au Sénat français sur l’accord franco-algérien de 1968.

« Nous nous approchons dangereusement du point de non-retour », a alerté le sénateur écologiste.

« D’autres pays, conscients des mutations du monde, travaillent à bâtir des relations équilibrées, fondées sur le respect mutuel et le principe du partenariat gagnant-gagnant », a-t-il souligné.

La tenue de ce débat dans l’auguste palais du Sénat français sur un accord « vidé de sa substance » et dont la futilité n’a d’égal que l’importance des enjeux économiques et stratégiques de la relation avec l’Algérie, le jour même où le chef de la diplomatie italienne discute à Alger de gaz, d’énergies renouvelables et d’investissement, est révélateur à la fois de l’égarement d’une partie de la classe politique française et de la perspicacité de leurs homologues italiennes.

Le sénateur Mellouli a rappelé que 450 entreprises françaises sont présentes en Algérie et que plus de 6 000 autres y exportent leurs produits. « Dans ce battage politico-médiatique, avons-nous mesuré l’impact potentiel sur ces entreprises et les milliers d’emplois qu’elles génèrent ? », s’est-il interrogé.

L’Italie, premier client de l’Algérie

Au moment où la France recule en Algérie, l’Italie y renforce inexorablement sa place. L’Italie est le premier acheteur de l’Algérie dont elle absorbe désormais le quart des exportations (9,95 milliards d’euros durant les 11 premiers mois de 2024).

Elle est aussi son troisième fournisseur, avec une part de 6,6%, tout juste derrière la France. Les derniers chiffres publiés par l’agence AGI font état de l’exportation pour 2,57 milliards d’euros de marchandises italiennes vers l’Algérie pendant la même période, constituées notamment de véhicules, de machines et de produits pétroliers raffinés. Mais les Italiens veulent aller encore plus loin.

« Nous voulons aussi continuer à exporter, pas seulement importer. Nous exportons surtout des véhicules et des machines, il faut faire plus », a ainsi résumé Antonio Tajani les ambitions de son pays avec l’Algérie.

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