Le Conseil national de Jil Jadid qui s’est réuni vendredi 22 novembre a dressé un constat peut reluisant de la situation politique, économique et sociale en Algérie.
Au plan politique, le parti de Soufiane Djilali fait un constat accablant. Pour lui, le « cycle de la démocratisation tel qu’il avait été engagé avec la Constitution de 1989 semble se refermer ».
Jil Jadid déplore la marginalisation des partis politiques en Algérie, qui sont dans les « faits, marginalisés et voués à être réduits à de simples appendices administratifs, de soutien pour une partie d’entre eux ou mis en situation d’inactivité implicite pour une autre partie ».
« Le modèle démocratique de 1989 s’est effondré »
Il estime que la « mise à l’écart de tous les partis politiques dans la formation d’un gouvernement technocratique et la gestion hypercentralisée de toutes les institutions du pays, y compris celles censées dépendre du choix populaire, reflètent une attitude négative, voire hostile, à tout contre-pouvoir ».
Jil Jadid aborde ensuite la situation des médias algériens, désarmés « par le jeu des subventions et des pressions multiformes » et qui sont « aujourd’hui objectivement et moralement en situation critique ».
Les médias algériens, poursuit le Conseil national de Jil Jadid, « ne sont plus en mesure d’accomplir leur rôle. Ils sont discrédités et sans emprise sur l’opinion publique, cédant leur espace informationnel au nihilisme et au mercenariat des ‘influenceurs’ localisés à l’étranger ».
Revenant à l’expérience démocratique de 1989, Jil Jadid acte son décès. Pour lui, le modèle de démocratie instituée après les évènements d’octobre en 1988 en Algérie, s’est « effondré ».
« La défection et même la défiance populaire vis-à-vis de l’action politique, le retour à l’uniformisation d’un discours laudateur et l’absence de toute marge pour un contre discours, manifestent le stade ultime de l’échec du cycle démocratique ouvert par les évènements d’Octobre 88 », assène encore Jil Jadid.
Dans la foulée, le parti de Soufiane Djilali lance une initiative politique en forme de proposition à « l’ensemble des patriotes, partisans ou non » pour « entamer un débat sérieux pour aboutir à une vision d’avenir qui pourrait être défendue collectivement auprès des institutions nationales en vue d’un renouveau démocratique ».
Jil Jadid précise que ce débat politique doit se reposer sur des « règles saines et transparentes dont les objectifs seraient d’abord et avant tout la cohésion nationale et la modernisation effective du pays, [qui] pourraient offrir une nouvelle base de départ ».
Jil Jadid met en garde contre les conséquences de la gestion administrative de l’économie
Au plan économique, Jil Jadid applaudit les mesures prises par le gouvernement sur le fond, mais il estime que la méthode est « contre-productive ».
Pour ce parti, il est « indéniable que sur le principe, les choix annoncés sont méritoires : réduire les importations, maintenir des prix à la consommation compatibles avec le pouvoir d’achat, relancer les grands projets dans la production nationale ».
Le parti de Soufiane Djilali critique le « retour au centralisme économique pour ne pas dire aux anciennes formes d’un socialisme archaïque avec une gestion administrative autoritariste [qui] ne peut que entraver la mise en place d’une économie efficace et viable ». Il ajoute que le « développement sournois mais réel et à plusieurs niveaux de la corruption qui en découle ne peut qu’alerter la conscience nationale ».
Jil Jadid critique aussi la « volonté de contrôler administrativement les prix à la consommation et la remise en place des monopoles publics », qui vont, selon lui, « invariablement entraîner une baisse de la qualité des produits mis sur le marché et la multiplication des détournements et des dérives de gestion publique au détriment du consommateur ».
Jil Jadid rappelle que l’Algérie mais aussi plusieurs nations avaient déjà « expérimenté la gestion administrative de l’économie. Comme chacun le sait, les mêmes causes induisent les mêmes effets ! Quel que soit le génie des gouvernants en poste, il n’est pas possible de métamorphoser la nature de l’acte économique qui est fondamentalement liée à la nature humaine ».
Pour la Loi de finances 2025 qui a été signée dimanche par le président de la République, Jil Jadid s’inquiète des conséquences du « déficit colossal et incompréhensible » du budget de l’État, qui expose, selon lui, « l’ensemble du système financier à une déstabilisation inflationniste majeure et risque de créer de graves distorsions avec des répercussions graves en cas de baisse du prix des hydrocarbures sur le marché international ». Il estime que « le déficit colossal qu’elle prévoit met en danger l’économie du pays ».
Au plan social, Jil Jadid estime que la « logique sous-jacente » de mesures prises pour améliorer le pouvoir d’achat des Algériens « risque d’aggraver la situation au lieu de l’améliorer ». Il cite la « reprise en main administrative des processus économiques », qui va, de « facto, entraîner les pénuries, la spéculation, la corruption et in fine, l’affaiblissement de tout l’appareil productif, relançant ainsi le chômage de masse ».
S’il admet que la paix sociale est une « dimension importante à considérer », Jil Jadid juge qu’elle doit « s’insérer dans une logique de développement du pays et non pas créer une paix sociale factice, forcément temporaire ».
Jil Jadi plaide pour une nouvelle vision des rapports de l’Algérie avec l’Europe
« La multiplication des affaires scandaleuses touchant des commis de l’État montre clairement que la lutte contre la corruption est pour le moins inefficace dans sa logique actuelle », estime Jil Jadid.
Jil Jadid plaide pour le dialogue pour résoudre les problèmes et critique « l’autoritarisme » qui « ne peut que générer encore plus de conflits et plus de tensions et ce, au détriment de la nation ».
Au plan international, Jil Jadid salue les « positions de l’Algérie. Son rôle, notamment au niveau du Conseil de sécurité de l’ONU est honorable et mérite reconnaissance ».
Il ajoute que l’invitation faite par le sommet des Brics+ à l’Algérie pour être dans un « statut de partenaire doit être appréciée à sa juste valeur », et juge « impératif de saisir cette opportunité pour offrir au pays la possibilité de contribuer à l’établissement d’un nouveau cadre de coopération international et surtout de se donner des outils financiers et commerciaux modernes ».
Toutefois, Jil Jadid pense que ce « positionnement en faveur d’un monde multipolaire ne doit évidemment pas signifier une quelconque hostilité vis-à-vis des autres partenaires traditionnels. En particulier, une nouvelle vision de nos rapports avec le proche voisinage européen doit intégrer les dimensions géographiques, historiques, humaines, et de complémentarité économique permettant des échanges dans l’intérêt des deux parties ».
Pour Jil Jadid, l’Algérie a « tout à gagner dans un rapport équilibré avec l’ensemble des pôles de puissance dans le monde ».