L’Algérie n’achète presque plus de blé français. Effet de la brouille politique ou pas, il reste que les ventes de blé par la France à l’Algérie ont fondu comme neige au soleil depuis 2019.
L’Algérie est un gros importateur de blé et la France était son principal fournisseur, lui livrant des quantités équivalentes parfois à 80% de ses besoins.
De 5 millions de tonnes en 2015 à zéro en 2025 : les achats algériens de blé français en chute libre
La place des céréaliculteurs français sur le marché algérien a commencé à décliner après 2019, année pendant laquelle ils avaient fourni à l’Algérie 5 millions de tonnes de blé tendre pour près de 1 milliard d’euros.
En 2020, l’Algérie a modifié son cahier des charges pour l’importation des céréales en révisant à la baisse les critères techniques, ce qui a ouvert la porte au blé de la mer Noire, auprès des céréaliculteurs russes et ukrainiens, pour des raisons liées principalement aux coûts.
Si l’Algérie s’est détournée du blé français, ce n’était pas pour des raisons politiques. La faute incombait à une mauvaise production en France. Redoutant des conséquences sur sa sécurité alimentaire, l’Algérie a opté pour la diversification de ses sources d’approvisionnement.
Mais les quantités importées de France ont tellement baissé en 2024 que beaucoup ne s’empêchent pas d’y voir une retombée directe de la crise qui secoue la relation bilatérale depuis juillet dernier et d’évoquer des “mesures de rétorsion” de l’Algérie.
Blé français en Algérie : un déclin amorcé en 2019
De 5 millions de tonnes en 2019, les achats algériens de blé français ont baissé à seulement 1,5 million de tonnes en 2024. Et le pire est peut-être à venir pour la filière céréalière française.
Les ventes à l’Algérie “risquent d’être proches de zéro” en 2025, écrit le journal français Le Progrèsqui souligne que le dernier cargo de blé français a “déchargé sa cargaison en Algérie en juillet dernier”, soit juste avant le début de la crise politique en cours.
Après l’exclusion en octobre 2024 des céréaliers français d’un appel d’offres pour la livraison de 500 000 tonnes de blé, l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) a avancé des critères techniques.
“En ce qui concerne la consultation restreinte lancée par l’OAIC le 6 octobre 2024, nous précisons qu’elle a été régie par des critères techniques spécifiques, en fonction des besoins industriels particuliers à cette période”, avait expliqué l’organisme public en charge de l’importation de blé.
Le Maroc peut-il compenser la perte du marché algérien ?
Faisant le lien avec les tensions politiques en cours, déclenchées en juillet dernier par l’alignement de la France sur les thèses marocaines sur le Sahara occidental, le Progrès signale que, “ironie du sort, c’est le Maroc qui est devenu le premier acheteur de blé tendre français devant la Chine, compensant en partie l’arrêt des exportations vers l’Algérie”.
C’est toute la relation économique qui est impactée. Bien qu’elle soit demeurée en 2024 le deuxième débouché africain pour les produits hexagonaux, l’Algérie a moins acheté à la France pendant la même année, soutient la même source.
Algérie – France : ce que disent les chiffres du commerce bilatéral
Néanmoins, cette affirmation est démentie par les chiffres officiels du commerce bilatéral dévoilés début mars par la direction générale du Trésor français.
Les échanges commerciaux entre les deux ont certes baissé en valeur à 11,1 milliards d’euros en 2024 contre 11,6 milliards en 2023. Mais la baisse s’explique seulement par le recul des cours des hydrocarbures, principal produit vendu par l’Algérie à la France.
Les exportations françaises ont au contraire augmenté en 2024, atteignant 4,8 milliards d’euros, soit 6,6% de plus que 2023, et la France a résorbé le déficit de son commerce avec l’Algérie de 1,1 milliard d’euros.
Le déclin est toutefois vrai pour la filière agricole, malgré une reprise timide des livraisons de céréales en 2024 (329 millions d’euros).
Selon les chiffres de la direction du Trésor, autrefois pilier des échanges économiques entre les deux pays, le secteur agricole n’était plus que le quatrième poste des exportations françaises vers l’Algérie, derrière les produits industriels, les matériels de transport et les équipements mécaniques, électriques et électroniques.