Politique

Crise avec la France : l’Algérie doit changer de cap, selon Rahabi

L’une des rares personnalités algériennes à s’exprimer régulièrement sur la crise entre la France et l’Algérie, Abdelaziz Rahabi a de nouveau évoqué le sujet. Invité dimanche soir par la chaîne Berbère Télévision, le diplomate et ancien ministre algérien a rejeté la balle dans le camp des plus hautes autorités françaises.

Soulignant que des membres du gouvernement français tiennent un discours “inamical, parfois martial et belliqueux”, Rahabi s’est dit “inquiet” du fait que ces ministres ne soient pas rappelés à l’ordre par le président français.

L’allusion est évidemment à un ministre comme Bruno Retailleau qui tient un discours sur l’Algérie ouvertement aux antipodes de la volonté d’apaisement exprimée par exemple par son collègue des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. .

Rahabi : L’Algérie « n’est pas responsable de la crise » avec la France

C’est du reste la lecture que fait Abdelaziz Rahabi du message du président Abdelmadjid Tebboune dans sa dernière interview au journal français L’Opinion, diffusée dimanche 2 février.

“Je pense aussi au sens du message du président de la République dans sa dernière interview : il y a une responsabilité de la France au plus haut niveau dans la recherche de l’apaisement”, déclare l’ancien ambassadeur d’Algérie en Espagne.

D’autant plus, ajoute-t-il, que l’Algérie n’est “pas responsable de la crise actuelle”, rappelant que la crise a commencé par “des déclarations très fortes, très inamicales, très agressives, de deux ministres français”. C’est donc à la France “de chercher des moyens d’apaisement”, estime-t-il.

Rahabi dit toutefois avoir cru voir “des signes d’apaisement dans le discours du ministre des Affaires étrangères” français.  Néanmoins, poursuit-il, il faut passer à “une autre phase” et l’Algérie ne doit pas régler sa politique étrangère en fonction de ses relations avec la France.

“Nous avons un agenda très grand, très large et nous avons des frontières communes avec 7 pays. Dans toute notre région, il y a des tensions. Le monde évolue, va vite, change. Nous devons nous adapter, nous avons la capacité de nous adapter parce que nous sommes des Méditerranéens avant tout, nous avons un capital historique et culturel qui nous qualifie à nous adapter à toutes les situations. Nous avons aussi des demandes internes, la société algérienne a des demandes de liberté, des demandes de justice”, a-t-il expliqué.

Pour Abdelaziz Rahabi, la communauté algérienne en France est “centrale”

Évoquant la communauté algérienne en France, Rahabi l’a qualifiée de “centrale”.  “Parce que l’Etat a le devoir de protection de la communauté. C’est une caisse de résonance de relation algéro-française, une normalisation, une stabilisation et un retour à la normale favoriserait la situation globale de notre communauté en France”, a estimé le diplomate.

L’autre point évoqué est la prétendue aide au développement que l’extrême-droite française appelle à “couper” à l’Algérie.

“Il y a beaucoup de choses qui se construisent en France à partir de rien”, souligne Rahabi, indiquant que cela “a commencé avec Sarkozy et cette histoire de repentance”, chose que l’Algérie n’a pas demandée et qui “n’existe pas dans notre culture ni dans notre religion”, la repentance étant “quelque chose qu’on fait devant Dieu uniquement”.

“Dire que les Algériens ont demandé la repentance, c’est surtout diaboliser les Algériens et faire en sorte que la classe politique et la société françaises rejettent la reconnaissance des crimes commis par le colonialisme”, indique-t-il.

Il en est de même pour l’aide au développement dont on parle tant et qui, explique Rahabi, n’existe pas.

 “Il n’y a pas d’aide au développement (de la France à l’Algérie). Quand l’ambassade de France donne des bourses à des étudiants algériens en France, “vous ne pouvez pas les comptabiliser comme de l’aide au développement” et quand le gouvernement français “investit dans l’aide aux entreprises françaises qui s’installent en Algérie pour pénétrer le marché, ce n’est pas de l’aide au développement”, a assuré le diplomate.

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