En conférence de presse ce lundi 30 décembre à Alger, le ministre des Affaires étrangères Ahmed Attaf ne s’est pas trop étalé sur la crise en cours avec la France. Le chef de la diplomatie algérienne n’a pas laissé entrevoir un durcissement de la crise ni un apaisement en perspective.
Algérie – France : le statut quo est bien parti pour durer
“Je crois que ce qu’a dit hier (dimanche 29 décembre, NDR) le président de la République est suffisamment à la hauteur du défi que certaines parties en France veulent nous imposer”, a répondu Ahmed Attaf à une question sur la brouille entre Alger et Paris.
Le chef de la diplomatie algérienne a ajouté que les attaques actuelles contre l’Algérie n’ont rien de nouveau et elles vont, comme les précédentes, “échouer face à la résistance de notre peuple qui est plus forte”.
Dimanche, dans un discours devant le Parlement, le président de la République Abdelmadjid Tebboune a usé de mots très forts lorsqu’il a évoqué l’affaire Boualem Sansal qui empoisonne davantage la relation bilatérale.
L’écrivain franco-algérien a été arrêté le 16 novembre dernier à l’aéroport d’Alger. Inculpé d’atteinte à la sûreté de l’Etat et à l’intégrité du territoire national, il est incarcéré, suscitant une vague d’attaques contre l’Algérie émanant de l’extrême-droite française dont il est proche.
Pour le président Tebboune, Boualem Sansal est un “imposteur” qui ne connaît “ ni son identité ni son père” et qui a été “envoyé pour dire que la moitié du territoire algérien appartient à un autre Etat”. L’écrivain avait soutenu dans un journal français d’extrême-droite que l’ouest algérien appartenait historiquement au Maroc.
Dans son discours, le chef de l’Etat avait réitéré que le colonialisme français a commis un génocide et des crimes en Algérie et signifié que l’Algérie ne réclame ni des excuses ni une compensation financière, mais que la France reconnaisse les méfaits de son passé colonial en Algérie.
Crimes du colonialisme français : l’Algérie persiste et signe
Ahmed Attaf a répété au cours de sa conférence de ce lundi que la question de l’indemnité coloniale n’est pas posée et n’a pas été proposée par la commission mixte d’historiens dont les travaux sont gelés à cause de la crise politique en cours.
Les plus de cinq millions de victimes du colonialisme « n’ont pas de prix » et l’Algérie veut la « reconnaissance qui a une très forte charge symbolique », a-t-il insisté.
L’indemnisation a été retenue dans un seul dossier, celui des essais nucléaires. A propos de ces essais, le chef de la diplomatie algérienne a accusé la France d’avoir refusé de nettoyer les sites contaminés dans le Sahara algérien ou même de contribuer financièrement à la décontamination.
“Le dossier de la mémoire n’est pas clos et ne le sera jamais. La criminalisation du colonialisme est désormais une affaire internationale”, a-t-il dit. La question sera abordée en 2025 au niveau de l’Union africaine.
Ahmed Attaf n’est pas allé plus loin sur la crise Algérie-France. Interrogé sur la convocation de l’ambassadeur de France Stéphane Romatet et si les deux pays sont de facto dans la rupture, il n’a pas répondu. Il est vrai que la question a été très mal posée, noyée dans une série interminable d’autres questions sur des sujets différents.
Il reste qu’à l’issue de la conférence de presse du ministre algérien des Affaires étrangères, dont l’objet était de présenter le bilan de la diplomatie algérienne en 2024, l’opinion n’est pas davantage éclairée sur l’avenir immédiat de la relation entre l’Algérie et la France. Ahmed Attaf n’a pas dit combien de temps le poste d’ambassadeur d’Algérie en France restera encore vacant.
L’Algérie est sans ambassadeur à Paris depuis juillet dernier et le retrait de Saïd Moussi suite au revirement français dans le dossier du Sahara occidental.
La crise a été aggravée par les attaques qui ont suivi l’arrestation de Boualem Sansal et par les révélations faites sur l’implication des services français dans une tentative de créer des cellules terroristes en Algérie. C’est à cause de cette dernière affaire que l’ambassadeur Stéphane Romatet a été convoqué à la mi-décembre au ministère des Affaires étrangères.