Politique

Crise France – Algérie : des Franco-Algériens montent au créneau

Des Franco-Algériens font entendre leur voix face aux attaques de la droite et de l’extrême-droite française qui ciblent l’Algérie sur fond de crise diplomatique entre les deux pays.

« La cabale organisée méthodiquement par la droite et l’extrême droite contre l’Algérie et ses ressortissants depuis quelques jours est immonde », écrit sur X la députée d’origine algérienne Sabrina Sebaihi.

Sebaihi, Mellouli, Zéribi, Hafiz : les Franco-Algériens répondent à l’extrême-droite

La parlementaire a partagé une séquence de son intervention lors du rejet, il y a une année, d’une résolution appelant à la révocation de l’accord de 1968 sur l’immigration.

Cet accord est dans le viseur de nombreux personnages de l’extrême-droite et de la droite dure, notamment le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, qui se trouve aux avant-lignes de la crise en cours avec l’Algérie.

« Voilà qu’ils (les Algériens) seraient privilégiés par l’accord franco-algérien de 1968, qu’ils viendraient voler notre pain, qu’ils seraient tous délinquants. Visiblement, le colonialisme a la vie dure, comme les clichés racistes et xénophobes », ajoute-t-elle.

Le même courant appelle depuis quelques jours à prendre des mesures de rétorsion contre l’Algérie, à laquelle il est reproché notamment de maintenir en détention l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal et d’avoir refusé d’accueillir un influenceur expulsé de France pour « appels à la violence ».

Interrogée par France 3, la députée écologiste a répondu qu’un tel discours n’est pas fait pour apaiser les choses et procède d’un « agenda politique ».

« Je ne pense pas que ce soit de nature à apaiser des relations qui sont déjà fortement complexes et pas si évidentes que ça », a dit Sabrina Sebaihi, ajoutant « que tout cela répond peut-être à un agenda politique qui est celui de l’élection présidentielle française et qui vient percuter finalement cette actualité internationale ».

Pour la parlementaire écologiste, « le gouvernement devrait avoir le souci de l’apaisement et du dialogue avec l’Algérie », mais, regrette-t-elle, « nous en sommes loin ».

« Un ressentiment idéologique anti-algérien »

Akli Mellouli est sénateur du même parti, les Écologistes. Il est, lui aussi, Franco-Algérien.

Pour lui, ces polémiques récurrentes autour de l’Algérie, « traduisent parfois un ressentiment idéologique anti-algérien d’une partie de la classe politique française » et « heurtent » les « millions de Français d’origine algérienne ou ayant des liens affectifs et historiques avec l’Algérie et qui participent à notre richesse nationale ».

« La France a une dette morale et historique envers l’Algérie, née de notre passé commun, souvent douloureux » et ces « polémiques et invectives qui surgissent régulièrement ne peuvent être des piliers d’une diplomatie solide », écrit le sénateur sur LinkedIn.

Karim Zéribi, ancien député européen d’origine algérienne, a, lui, tenu à répondre au président Emmanuel Macron qui a affirmé le 6 janvier que l’Algérie se « déshonore » en maintenant en détention l’écrivain Boualem Sansal.

« Ce sont des mots forts. Le mot honneur ou déshonneur en Algérie, ça a une résonance, un peuple qui s’est battu pour son indépendance, pour sa dignité, pour sortir de l’indigénat… », a dit Zéribi, qui estime que le déshonneur est dans l’attitude de la France par rapport à ce qui se passe en Palestine.

« Qu’est-ce qu’on pourrait dire du déshonneur de la France quand notre pays choisit d’apporter un soutien inconditionnel au gouvernement d’extrême-droite et messianique de Netanyahou face au peuple palestinien qui se fait éradiquer ? », s’interroge-t-il.

Le Franco-Algérien souligne aussi que la France n’a rien dit lorsque ses gendarmes ont été humiliés en Israël.

« Quand nos gendarmes français se font piétiner et maltraiter en Israël, il n’y a pas une voix qui dépasse. Là, les termes humiliation et déshonneur ne sont pas utilisés », a-t-il relevé.

Renforcer les ponts entre la France et l’Algérie

Dans les attaques en cours, Chems-Eddine Hafiz, le recteur franco-algérien de la Grande mosquée de Paris (GMP), n’a pas été épargné. Il a été directement et nommément accusé de chercher à « déstabiliser » la France.

Après la réponse qu’il a apportée via un communiqué diffusé le 6 janvier, Hafiz a rebondi sur le sujet dans un billet mis en ligne sur le site officiel de la GMP, mardi 14 janvier.

« Dans cette ère où règne la désinformation, je ne céderai ni aux calomnies ni aux provocations », a-t-il assuré, dénonçant cette tendance de l’extrême-droite à faire des Franco-Algériens de parfaits boucs émissaires.

« Dans les moments de tension, ceux qui incarnent ce lien (entre l’Algérie et la France, ndlr) deviennent des cibles faciles, des boucs émissaires utilisés pour souffler sur les braises, au détriment du vivre ensemble », a regretté le recteur, réitérant que son ambition est de « renforcer les ponts entre la France et l’Algérie, deux nations aux destins liés, appelées à écrire ensemble une histoire de compréhension et de respect mutuels ».

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