Économie

El Mordjene : 4 révélations sur son interdiction en France

Le 13 septembre dernier, un arrivage de la pâte à tartiner algérienne El Mordjene en France est bloqué au port de Marseille et le produit est désormais interdit en France. Cet incident a fait couler beaucoup d’encre, ce produit 100 % algérien de l’entreprise Cebon connaît un véritable succès porté par les réseaux sociaux depuis le début de l’été.

Cette interdiction a d’autant fait parler que cette pâte à tartiner est commercialisée en France depuis 2023 sans qu’aucun problème relatif à sa composition, son importation ou sa commercialisation en France n’ait été signalé.

Une question légitime accompagne ce blocage soudain : pourquoi avoir attendu tout ce temps avant d’intervenir ?

Divers médias se sont emparés de l’affaire, dont Libération, qui fait le point sur les raisons de ce coup d’arrêt. Voici les 4 révélations clés à retenir.

1- El Mordjene contient un ingrédient que la France ne peut importer d’Algérie

Il aura fallu quatre jours après son blocage au port de Marseille, soit le mardi 17 septembre, pour que le ministère français de l’Agriculture s’explique.

Officiellement, et d’après la législation européenne, « l’Algérie n’a pas le droit d’exporter vers l’Union européenne des marchandises contenant des produits laitiers destinés à la consommation humaine ».

El Mordjene contient effectivement de la poudre de lait, et en vertu du règlement d’exécution 2021/405, elle ne peut être importée et commercialisée sur le sol européen.

C’est au poste de contrôle frontalier du port de Marseille, dont l’activité relève du ministère français de l’Agriculture, que cet élément a été détecté, comme le révèle le mail d’un exportateur adressé au média L’Algérie Aujourd’hui : « Cette pâte à tartiner est bien soumise à un contrôle vétérinaire en PCF (poste de contrôle frontalier) puisqu’elle contient du lait en poudre et/ou du lactosérum ».

2- Même si l’ingrédient incriminé provient de France, il est interdit d’importation

Les produits laitiers et les aliments contenant des dérivés de lait ou du lactosérum (petit lait) provenant d’Algérie sont donc interdits à l’exportation en France et en UE.

Dans le cas de la pâte à tartiner El Mordjene, la poudre de lait entrant dans sa composition à hauteur de 12 % « est importée de France », assure Amine Ouzlifi, porte-parole de l’entreprise Cebon.

Le ministère français chargé de l’agriculture va cependant expliquer que dès lors que le produit (poudre de lait) est transformé en Algérie, son importation devient interdite en France.

En outre, le ministère français ajoute que « l’Algérie ne dispose pas d’établissement agréé et listé par la Commission européenne pour la transformation et la production de produits laitiers ».

3- El Mordjene aurait été importée avec des « déclarations erronées »

De nombreuses interrogations du grand public ont porté sur le blocage soudain d’El Mordjene en France, alors même qu’elle y était commercialisée depuis 2023. Le porte-parole de l’entreprise algérienne s’interroge à juste titre : « Si le produit n’est pas conforme, pourquoi avoir attendu qu’il connaisse le succès pour agir ? ».

Le ministère français de l’Agriculture expliquera à CheckNews (Libération) : « C’est suite à une demande d’information d’un transitaire, la semaine dernière, sur les conditions d’importation de cette marchandise, qu’une expertise a été menée et a conduit à informer l’opérateur que l’importation de cette marchandise n’était pas autorisée ».

Le ministère français ne fournira ni l’identité de l’importateur français, ni celle du transitaire impliqué, mais assurera que les importations d’El Mordjene auraient dû être bloquées depuis le début.

Selon les autorités, si El Mordjene a pu entrer sur le marché français, c’est en raison de fausses déclarations lors de son importation.

« À ce stade de l’enquête, il semble probable que la marchandise ait pu être importée jusqu’à présent en raison de déclarations à l’importation erronées », indique le ministère, sans plus de détails concernant la nature de ces déclarations et leur caractère potentiellement volontaire.

4- L’étiquetage nutritionnel d’El Mordjene ne respecte pas les standards européens

Ce dernier point n’a pas été soulevé par une autorité officielle comme le ministère français de l’Agriculture, mais par le magazine « 60 millions de consommateurs ».

D’après Xavier Lefebvre, ingénieur agroalimentaire à l’Institut national de la consommation et éditeur du magazine, « l’affichage nutritionnel n’est pas clair et ne respecte pas le format standard français et européen, il n’affiche pas les graisses saturées par exemple ».

Pointant du doigt ce qui peut être une autre potentielle lacune dans l’importation d’El Mordjene, il se tourne vers la liste des ingrédients : « Quand un ingrédient est mis en avant sur l’emballage, ici les noisettes, leur quantité doit être indiquée ».

Pour rappel, plusieurs conteneurs des produits El Mordjene sont encore bloqués au port de Marseille. Leur sort, qu’il s’agisse d’un renvoi ou d’une destruction, sera conjointement décidé par l’importateur et l’exportateur.

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