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Emploi des étrangers en France : ce qui risque de changer

La “préférence nationale” constitue un point principal du programme du Rassemblement national (RN, extrême-droite) en France. Le parti de Jordan Bardella et de Marine Le Pen vient de proposer, afin de concrétiser ce principe, d’instituer l’interdiction aux employeurs de recruter un étranger quand un Français postule pour le même poste.

Ce qui est déjà presque une réalité dans le monde de l’emploi en France, le RN demande à le formaliser et à le rendre légal. Les étrangers et même les Français d’origine étrangère se plaignent d’être discriminés à l’emploi, ce qui a été du reste confirmé plus d’une fois par des rapports et études.

Emploi des étrangers en France : le RN veut introduire le critère de nationalité

Après la polémique suscitée pendant la campagne électorale aux législatives de l’été dernier par ses propositions d’interdire certains postes aux binationaux, le parti d’extrême-droite s’attaque à tous les postes de travail, y compris dans le privé, qui doivent donc revenir selon lui en priorité aux Français.

Dans son programme présenté le 14 septembre aux entreprises, le RN qui est passé à côté d’une victoire aux dernières législatives, a explicitement écrit qu’il faut “appliquer la priorité nationale, à compétences égales, pour l’ensemble des postes à pourvoir en France”, rapporte le journal Le Monde.

Il s’agit en fait d’une vieille revendication du parti fondé par Jean-Marie Le Pen au début des années 1970. En 1978 déjà, un de ses slogans était  “un million de chômeurs, c’est un million d’immigrés de trop. La France et les Français d’abord”.

En 2021, Marine Le Pen, alors présidente du parti et sa candidate à l’élection présidentielle de 2022, était sur la même longueur d’onde, déclarant que “le Français est chez lui” et qu’ “il faut permettre aux employeurs de donner en priorité accès à l’emploi à un Français”.

Dans sa brochure, le RN ne propose pas d’interdire complètement le recrutement d’étrangers. Ceux-ci pourront être acceptés mais uniquement s’ils disposent de “compétences rares et nécessaires à la prospérité de l’économie française”.

Le RN veut instituer la préférence nationale dans l’emploi dans tous les secteurs en France 

Sinon, estime le parti, Il faudra “inscrire la nationalité parmi les critères de choix d’un candidat”, comme cela se fait déjà à large échelle dans la fonction publique.

Le programme du parti pour les élections législatives présenté par Jordan Bardella avait contenu la proposition d’interdire complètement le recrutement d’étrangers dans la fonction publique.

Entre les deux tours du scrutin, le parti a scandalisé de larges franges de la société en exprimant sa volonté d’exclure les binationaux de certains postes stratégiques. Le RN était alors favori pour remporter les législatives et former le gouvernement. Mais à l’issue du second tour, il n’est arrivé que troisième derrière l’alliance de gauche Nouveau front populaire (NFP) et le camp présidentiel.

En France, la montée en puissance du RN a été portée ces dernières années par ses positions tranchées vis-à-vis des étrangers et de l’immigration.

Son retour à la charge sur ce thème pourrait s’inscrire dans sa stratégie pour l’élection présidentielle de 2027 où même pour de nouvelles élections législatives si le président Emmanuel Macron décide de dissoudre l’assemblée dans une année, comme le permet la Constitution.

Hormis pour le dérapage sur les binationaux aux dernières législatives, la stratégie de désigner les étrangers comme la source des problèmes des Français, notamment l’insécurité et le chômage, a fonctionné, permettant au parti de monter de scrutin en scrutin, jusqu’à être présent au deuxième tour des deux dernières présidentielles et à obtenir 126 sièges à l’Assemblée nationale.

En décembre dernier, Marine Le Pen avait qualifié la mouture de la loi immigration votée par les députés de ”victoire idéologique” du RN. Ce sont les voix de ce parti qui ont en effet permis l’adoption du texte jugé ferme et dur contre l’immigration avant d’être assoupli par le Conseil constitutionnel.

Le RN était notamment vent debout contre la proposition du gouvernement de régulariser les travailleurs étrangers dans certains secteurs dits ”sous tension”, c’est-à-dire en manque de main d’œuvre.

Lors des débats sur la loi immigration à l’automne dernier, le président du Medef, principale organisation patronale de France, avait déclaré que l’économie française aura besoin “massivement” de travailleurs étrangers dans les prochaines décennies. En mai dernier, Jordan Bardella a mis un peu d’eau dans son vin en se disant favorable, au nom de la “réalité économique”, à “faire appel à des talents dont nous ne disposons pas en France”.

Sur les 26,5 millions de personnes qui travaillent en France, trois millions sont des immigrés, selon les chiffres publiés par l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) en 2019, soit un taux de 11 %, et dont plus du quart sont des ouvriers.

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