En juin dernier, un policier français hors service tire à sept reprises sur Amar Slimani, un jeune algérien sans domicile fixe et en situation de grande précarité en France. Ce crime est passé complètement inaperçu auprès des grands médias. Sa famille peine encore à faire son deuil.
Face au silence assourdissant des médias et des autorités françaises sur ce meurtre, la web TV Blast a rouvert l’affaire, près de six mois après son lâche assassinat, en donnant la parole à la famille de Amar et à son avocat pour comprendre ce qu’il s’est passé.
Revenant sur les circonstances de ce crime abject, Me Yacine Bouzrou, l’avocat de la famille, explique que Amar dormait dans la dépendance d’une maison située dans le quartier de l’Abreuvoir, à Bobigny. La propriétaire de la maison a appelé des membres de sa famille pour signaler sa présence.
« C’est un dossier qui m’a beaucoup choqué »
Le petit-fils de celle-ci, un policier hors service cette nuit, s’est rendu sur les lieux après avoir informé ses collègues sur la présence d’un squatteur dans la maison de sa grand-mère. Mais avant l’arrivée des autres policiers, il dégaine son arme et tire à plusieurs reprises sur Amar, sans aucun motif valable. Le jeune algérien n’était ni armé ni menaçant.
« Il l’a abattu de sept balles tirées à bout portant », rappelle l’avocat. Le policier a avancé la thèse de la légitime défense pour justifier son acte. « Or, le nombre et la distance de tire permettent d’écarter totalement la thèse du policier », souligne-t-il.
Le pire, « ce qui m’a d’ailleurs beaucoup choqué », ajoute l’avocat, c’est le fait que le policier a pris Amar en photo après l’avoir tué. L’avocat se pose plusieurs questions, mais aucune ne justifie l’assassinat de Amar. « Pourquoi l’avoir abattu comme ça, ce policier aurait pu simplement l’arrêter ou procéder à son expulsion ».
Le juriste avance donc la thèse du racisme. « Le policier avait l’impression d’être devant un sous-homme, parce qu’il était un étranger. Le fait qu’il lui a mis une balle dans la tête et une autre dans le dos confirme que ce policier avait une haine qui dépasse le fait de venir déloger un squatteur ».
« Que vouliez-vous que je fasse face à des gens comme ça »
De plus, il ajoute que la manière dont le policier a défini Amar lors de son interrogatoire, en disant notamment : « Que vouliez-vous que je fasse face à des gens comme ça ? », montre un mépris total pour la personne.
Du côté des médias, c’était le silence total. Et les quelques articles consacrés à cet assassinat réduisent la victime à un « simple SDF » ou « squatteur ». Des étiquettes qui réduisent cet abject assassinat à un simple fait divers. Une déshumanisation complète de la victime.
C’est d’ailleurs ce qu’a fait très mal à sa famille. « Il avait sa mère, son frère et ses sœurs. Les médias français auraient au moins dû faire le travail correctement. C’est inconcevable qu’ils évitent de parler d’un tel crime », déplore Rachid Slimani, frère de la victime, interrogé par Blast.
Ce dernier, ainsi que sa mère, paraissent très effondrés et inconsolables suite à l’assassinat de Amar, mais aussi par la tournure qu’a prise l’affaire. « J’ai appris que le policier avait affirmé à ses collègues qu’il allait directement tuer Amar », ajoute-t-il.
« La police n’a même pas cherché à nous joindre, ni moi ni ma famille »
Pour Rachid, c’est clairement un acte raciste. « Le seul tort d’Amar pour avoir mérité un tel assassinat, c’est qu’il était un Algérien ». De plus, aucune autorité française n’a pris contact avec la famille Slimani, même pas pour l’enquête.
« La police n’a même pas cherché à nous joindre, ni moi ni ma famille. D’ailleurs, c’est là où je me suis mis à douter de l’État français », témoigne encore le frère d’Amar, qui raconte aussi la manière dont sa famille a appris la nouvelle.
« On m’a appelé du Bled pour m’informer de la mort d’Amar. C’était une connaissance d’Amar qui m’a appelé pour me demander d’agir vite pour l’enterrer au pays. J’ai appris la nouvelle deux jours après ». Si cette personne n’avait pas appelé Rachid, Amar aurait été incinéré, sans que sa famille ne soit au courant.
Pour rappel, le 1ᵉʳ juillet, l’auteur des tirs âgé de 27 ans a été mis en examen pour meurtre et placé en détention. À ce stade de l’enquête, l’intention raciste n’a pas été retenue par la justice française.