La polémique sur le roman « Houris » de Kamel Daoud ne s’estompe pas. L’écrivain franco-algérien s’est de nouveau exprimé sur les accusations qui le visent en Algérie, apportant une réponse quelque peu différente de ce qu’il a dit jusque-là.
Le roman, qui a comme trame de fond la décennie noire de terrorisme en Algérie des années 1990, a valu à son auteur de remporter le prix Goncourt 2024 le 4 novembre dernier.
Une femme l’a aussitôt accusé en Algérie d’avoir reproduit sa propre histoire qu’elle a vécue à la fin des années 1990 dans l’Ouest algérien. À Six ans, Saâda Arbane a échappé miraculeusement à la mort après avoir été égorgée par un groupe terroriste qui a décimé sa famille dans un village près de Tiaret. Elle a survécu, mais elle porte encore les stigmates de cet attentat, notamment une longue cicatrice au cou et une canule pour respirer.
Tous ces détails figurent dans le roman de Kamel Daoud. Saâda Arbane a assuré le 15 novembre sur la chaîne algérienne One TV que Aube, le personnage principal de Houris, c’est elle. Son histoire, elle l’a racontée à la psychiatre qui la suivait et qui n’est autre que la femme de Daoud, a-t-elle encore révélé.
Le 21 novembre, l’avocate Fatma-Zohra Benbraham a annoncé le dépôt de deux plaintes au tribunal d’Oran contre l’écrivain, une au nom de Saâda Arbane et une autre au nom des « victimes du terrorisme et des familles de disparus » en Algérie.
« L’éthique veut qu’on ne peut construire sa gloire sur le malheur des faibles. Kamel Daoud a construit sa gloire sur le malheur de Saâda. Il a étranglé une deuxième fois la voix dans la gorge de ma cliente », a accusé l’avocate en conférence de presse à Alger.
Kamel Daoud : « L’histoire de Saâda Arbane est connue de tous en Algérie »
L’écrivain est sorti du silence mercredi 4 décembre à travers un texte publié dans le journal français Le Point. « Cette jeune femme malheureuse clame que c’est son histoire. Si je peux comprendre sa tragédie, ma réponse est claire : c’est complètement faux », a-t-il écrit, accusant à son tour la femme d’être « manipulée ».
S’il a soutenu que l’histoire racontée dans « Houris » est une pure fiction, Kamel Daoud a quelque peu changé de version lors de son passage sur RTL ce mercredi 11 décembre.
Sans reconnaître clairement qu’il a reproduit la tragédie de Saâda Arbane, il a avancé que « tout le monde connaît son histoire en Algérie, et surtout à Oran ». « C’est une histoire publique », a-t-il insisté, expliquant que la mère adoptive de Saâda Arbane, qui est une ancienne ministre de la Santé algérienne, « a raconté son histoire partout ».
Bien qu’il reconnaisse que cette histoire soit publique, Kamel Daoud persiste toutefois à nier qu’il l’a reproduite dans son roman. « Le fait qu’elle se reconnaisse dans un roman qui ne la cite pas, qui ne raconte pas sa vie, qui ne raconte pas les détails de sa vie, je suis désolé, je n’y peux rien. Mon roman n’a rien à voir avec cette femme-là », s’est-il défendu.
SUR LE MÊME SUJET :
Affaire Kamel Daoud : ces éléments qui fragilisent la défense de l’écrivain