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La France a-t-elle vraiment octroyé 800 millions d’aides à l’Algérie ?

La France a-t-elle vraiment octroyé 800 millions d’aides à l’Algérie ?

Par luzitanija / Adobe Stock
Le drapeau de l'Algérie et de la France.

La polémique sur le montant de l’aide française à l’Algérie rebondit en France, avec les déclarations de Sarah Knafo, la députée européenne du parti Reconquête d’Éric Zemmour. L’avocat Nabil Boudi a annoncé un dépôt de plainte.

Le scandale escompté par Sarah Knafo s’est retourné contre elle et toute la mouvance à laquelle elle appartient.

Le fondateur de Reconquête ! Éric Zemmour est connu pour être un adepte de cette stratégie pour propager ses idées et son agenda politique sur les plateaux : lancer un mensonge, sur l’immigration, l’Islam, les Algériens, les étrangers et le répéter jusqu’à ce qu’il devienne une vérité admise auprès de l’opinion.

Quel est le montant réel de l’aide française à l’Algérie ?

Il manque certes dans certains médias ce réflexe de vérifier la véracité des affirmations qui manquent de rigueur. Sarah Knafo, eurodéputé proche d’Éric Zemmour, n’a pas eu beaucoup de chance lorsqu’elle a cru révéler un gros scandale en livrant le montant de l’aide de la France à l’Algérie : 800 millions d’euros par an.

« Je peux vous faire une liste longue comme le bras », dit le 20 septembre sur RMC Sarah Knafo à propos des dépenses inutiles du budget de l’État, « Est-ce que vous savez par exemple qu’on donne 800 millions d’euros à l’Algérie en aide publique au développement ? », lance-t-elle, ajoutant que même la Chine, « la première puissance économique du monde », est aidée « à se développer » et perçoit 120 millions d’euros par an dans le même cadre.

« Alors qu’on fait des appels aux dons pour financer des scanners à l’hôpital Georges Pompidou », dénonce-t-elle, en précisant qu’elle a été « magistrate à la Cour des comptes ».

Ces montants ont d’abord paru intrigants aux présents sur le plateau, avant d’être épluchés par des connaisseurs de la chose économique. Le résultat est que l’eurodéputé a menti d’une manière effrontée.

En tout cas, pour une ancienne magistrate à la Cour des comptes, elle a manqué de rigueur et elle a même persisté dans l’erreur, puisqu’elle affirmait déjà la même chose en mai dernier lors de la campagne des élections européennes pour lesquelles elle était candidate, alors que, selon elle, l’Algérie refusait de reprendre ses ressortissants en situation irrégulière en France.

Manipulation flagrante des chiffres concernant « l’aide » française à l’Algérie

La rédaction de TF1 a enquêté sur ces propos et a contacté l’entourage de Sarah Knafo qui a expliqué que l’eurodéputé a repris les chiffres de l’OCDE publiés en avril dernier par le magazine Challenges. L’article a été retrouvé et il s’avère que le vrai chiffre de l’OCDE, c’est 800 millions d’euros, mais sur cinq ans, de 2017 à 2021.

Sur le Portail des données de l’aide publique au développement de la France, l’Algérie a reçu 588,34 millions d’euros entre 2018 et 2022, soit 117 millions d’euros par an, alors que le Maroc a obtenu 2,356 milliards d’euros pendant la même période.

Le montant de l’aide au développement fourni à l’Algérie s’élève à quelque 130 millions d’euros par an. On est donc loin des 800 millions d’euros qui ont commencé à scandaliser sur les réseaux sociaux.

Outre les dénonciations, nombreuses, cette manipulation des chiffres risque d’avoir des retombées pénales. L’avocat franco-algérien Nabil Boudi, qui défend la boxeuse algérienne Imane Khelif dans sa plainte pour cyberharcèlement aggravé, a annoncé qu’il saisira la justice suite aux propos de Sarah Knafo.

« Une plainte sera déposée au Parquet de Paris, contre cette Députée européenne pour diffusion de fake news », a écrit l’avocat sur X.

Le Maroc premier bénéficiaire de l’aide française

Le chantage à l’aide au développement pour soi-disant contraindre l’Algérie à coopérer sur les reconduites aux frontières est un thème récurrent de l’extrême-droite française depuis 2021.

Or, l’Algérie, troisième puissance économique d’Afrique, est l’un des rares pays du Sud qui ne dépendent pas de l’aide au développement, française ou autre.

Le montant réel perçu annuellement est insignifiant, et même le chiffre de Sarah Knafo demeure dérisoire par rapport à ce que perçoivent certains pays qui, en effet, ne peuvent pas se passer de l’aide occidentale.

La page Union algérienne sur X a eu l’idée de partager le classement des États en termes de l’aide au développement perçue et a commenté : « En reprenant le concept de calcul de Knafo, l’Algérie n’est toujours pas dans le classement ».

En tête de celui-ci, on retrouve le Maroc, suivi de la Côte d’Ivoire, de la Colombie… Dans le top 10, il y a même la Turquie et évidemment l’Égypte. Des chiffres tirés du Portail des données de l’aide publique au développement de la France.

Algérie, période 2018 – 2022


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