Les prix du blé en Europe sont à la baisse. En cause, une information rapportée par des traders selon laquelle « le blé français n’avait pas été accepté dans un appel d’offres de l’Algérie », selon l’agence Reuters. Une situation qui rend plus difficiles les ventes de blé français à l’international.
Blé français, des prix en baisse
Les analystes notent que le blé meunier a clôturé mercredi à Paris à 209 euros la tonne après avoir atteint dans la journée un plus bas prix, soit 208,75 euros. En février dernier, la tonne de blé évoluait entre 230 et 240 euros.
Une baisse attribuée à la hausse de l’euro face au dollar et au dernier achat de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC). Un achat qui porte sur une estimation de 570.000 à 600.000 tonnes de blé clôturé mercredi, selon des négociants. Le blé acheté proviendrait principalement de la zone de la mer Noire.
Pour ces négociants, l’absence du blé français « n’est pas une bonne nouvelle ». « Si l’on ajoute à cela la faiblesse du dollar qui rend le blé européen encore moins compétitif, le marché ne peut que baisser », selon eux.
Ces analystes indiquent que l’Office algérien des céréales (OAIC) a « tacitement exclu » du blé et des « entreprises françaises » de ses appels d’offres en raison des tensions diplomatiques entre Paris et Alger. Ces tensions ont éclaté vendredi suite à l’incarcération d’un agent consulaire algérien en France dans le cadre d’une enquête sur l’enlèvement présumé d’Amir DZ.
En octobre dernier, l’OAIC a été accusé d’avoir exclu le blé français d’un appel d’offres, ce que le monopole algérien des importations de céréales a démenti.
Pour sa part, l’Office agricole public FranceAgriMer a revu à la baisse ses prévisions d’exportations de blé hors de l’Union européenne (UE). Des estimations liées à « une faible demande de l’Algérie et de la Chine ».
Ce qui porte la chute des exportations de blé français hors UE à 70 % par rapport à celles de la saison dernière. Une chute qui intègre également les piètres résultats de la récolte française touchée par des pluies exceptionnelles durant tout le cycle de culture.
Blé français, délaissé par l’Espagne et les Pays-Bas
Il n’y a pas que l’Algérie où le blé français est en difficulté. Des pays européens traditionnellement acheteurs de blé français se sont habitués à utiliser du blé ukrainien bien moins cher.
C’est le cas de l’Espagne, un pays confronté à des sécheresses à répétition et qui est devenu le premier acheteur européen de blé ukrainien. En mars 2024, France-Infos faisait remarquer : « Avant la guerre, le pays se procurait jusqu’à 350.000 tonnes par an ». C’est plus de 2,8 millions de tonnes désormais. Pour preuve, l’importateur espagnol José Luis Esteban qui « assume préférer le blé ukrainien, dont le prix est selon lui imbattable ».
Autre pays fortement importateur de blé ukrainien : les Pays-Bas. En décembre 2024, l’analyste Clémence Lenoir, chargée d’études économiques sur les grandes cultures à FranceAgriMer notait que « 70 % du blé ukrainien (importé par l’UE) va en Espagne, le maïs va surtout en Espagne et aux Pays-Bas. »
Les Pays-Bas importent la plus grande partie de leurs besoins en blé. En 2018, ils ne produisaient que 1,5 million de tonnes (Mt) de céréales pour des importations de plus de 12 Mt. Des besoins liés à l’alimentation animale avec un secteur qui en consomme 8 Mt annuellement.
Algérie, des pluies d’avril salvatrices
En Algérie, pour réduire sa dépendance vis-à-vis de l’importation, les pouvoirs publics peuvent jouer sur l’offre et la demande. Le développement de la culture du blé au Sud et le soutien à la filière ont permis « d’économiser 1,2 milliard de dollars cette année », a annoncé dimanche 13 avril le président Abdelmadjid Tebboune lors de sa rencontre avec les chefs d’entreprises algériens.
Les dernières pluies de ce mois d’avril devraient permettre une bonne récolte de blé au Nord du pays. Quant à la demande, ce volet n’est pas d’actualité bien que plusieurs options soient possibles en cas de difficultés.
Comme par exemple, orienter le soutien des prix du pain selon les revenus des ménages, jouer sur le taux d’extraction des farines ou accentuer la lutte contre les détournements frauduleux de blé vers l’élevage.
Quant à la filière céréales française, elle est fragilisée par la baisse de ses exportations, que ce soit au sein de l’UE ou hors UE et notamment vers l’Algérie. La fermeture de son principal marché à l’export ne pourrait avoir que de fâcheuses répercussions.
En janvier dernier, après une récolte en baisse de 27 %, Eric Thirouin, président de la filière blé, déclarait : « Aujourd’hui, les céréaliers ont le moral complètement en berne ».
Ils demandent des aides aux pouvoirs publics et un retour à l’accord d’association de 2016. Celui-ci prévoit la possibilité pour l’Ukraine d’exporter dans l’UE 900.000 tonnes de blé tendre à droits nuls, puis à 95 €/tonne au-delà de ce seuil.
Une décision qui dépend de la Commission européenne. Concernant les aides gouvernementales, avec la volonté du gouvernement français de trouver 40 milliards d’économie sur le prochain budget, il semble que les céréaliers français aient peu de chances d’être entendus.
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