Économie

Les Émirats relancent leur offre sur Naturgy, un client clé de Sonatrach

Les Émirats arabes unis, par le biais de la société Taqa d’Abu Dhabi, ne veulent plus lâcher l’affaire du rachat de parts dans l’un des plus importants acheteurs du gaz algérien et actionnaire à hauteur de 49 % du gazoduc Medgaz, l’Espagnol Naturgy.

Et ce, malgré l’échec de cette opération le 11 juin 2024, en raison de l’opposition de l’Algérie.

Naturgy est l’un des principaux clients de la société nationale des hydrocarbures, Sonatrach, qui détient 4 % des parts de l’opérateur énergétique espagnol. En avril 2024, Taqa, la holding d’Abou Dhabi spécialisée en eau et énergie avait entamé des négociations avec deux principaux actionnaires pour le rachat de leurs parts dans Naturgy.

Cette procédure devait obligatoirement déboucher sur une offre publique d’achat (OPA) sur l’intégralité du capital de Naturgy, en vertu de la loi espagnole. Or, en juin 2024, les négociations n’ont pas abouti et le projet a été abandonné.

L’Émirati Taqa lance une nouvelle tentative pour racheter Naturgy

Le projet du rachat de Naturgy par Taqa avait en effet provoqué des remous à Alger en raison des tensions avec les Émiratis arabes unis sur plusieurs dossiers. Selon des sources proches du dossier, citées en mai 2024 par l’agence Reuters, l’Algérie aurait même envisagé, à l’époque, d’annuler ses livraisons de gaz à Naturgy si ses actions étaient vendues à une autre entreprise.

La source n’avait pas spécifié l’identité de l’entreprise, mais il s’agissait bel et bien de la société émiratie, Taqa.

Cette semaine, Taqa a relancé une nouvelle tentative pour racheter des parts de Naturgy, rapporte ce vendredi 7 février le quotidien El Español. Les deux principaux actionnaires du géant énergétique espagnol, sont les fonds d’investissement GIP et CVC qui détient chacun 20 % du capital de Naturgy, seraient en effet prêts à négocier avec Taqa. En cas de réussite de cette deuxième tentative, les Émirats deviendront le principal actionnaire de Naturgy.

« Il y a une offensive brutale des Émirats arabes unis pour étendre leurs investissements dans l’énergie, la technologie et la défense en Afrique du Nord et dans les pays méditerranéens, en particulier en Espagne, où ils se sentent très à l’aise en raison de sa culture et de sa proximité », indiquent des sources d’une agence au journal espagnol.

« Taqa aura beaucoup de mal à racheter des parts dans Naturgy »

Toutefois, selon ces mêmes sources, « ces démarches ne plaisent toujours pas à Alger », sur fond des tensions diplomatiques avec les Émirats arabes unis.

Les deux pays ont en effet des points de vue opposés sur la situation en Libye, la crise au Sahel, la normalisation des relations avec Israël, ainsi que sur la question du Sahara occidental. Les Émirats arabes unis sont également très proches du Maroc, principal rival de l’Algérie, note-t-on encore.

Par conséquent, il s’avère que la nouvelle tentative de Taqa de racheter des parts de Naturgy a peu de chances d’aboutir. « Taqa aura beaucoup de mal, pour ne pas dire qu’il lui sera impossible, à racheter des parts dans Naturgy, car l’Algérie est déterminée à la bloquer », ajoutent encore les mêmes sources.

Offensive de Taqa sur Naturgy : un enjeu stratégique pour l’Algérie

Le journal El Español avait rapporté en décembre dernier que la dépendance de l’Espagne du gaz algérien a grimpé en flèche en 2024, dépassant les importations des États-Unis et de la Russie réunies. Le pays de la péninsule ibérique risque donc gros en s’opposant aux plans d’Alger.

Au cours des onze premiers mois de 2024, les importations de combustible algérien ont en effet atteint 38,7 % du total des importations espagnoles, ce qui représente une augmentation de 10 % par rapport à la même période en 2023, note le même journal. Ces niveaux n’avaient pas été enregistrés depuis 2021.

En juin 2024, Sonatrach et Naturgy ont signé un nouvel accord sur les prix du gaz, après l’échec de Taqa de prendre le contrôle de l’opérateur espagnol qui représente un enjeu stratégique pour l’Algérie.

Naturgy est non seulement un grand client de Sonatrach, mais aussi, il détient 49 % du capital de la société qui gère Medgaz.

Ce gazoduc sous-marin d’une capacité de 8,2 milliards de m3 par an, dont Sonatrach détient 51 %, relie directement l’Algérie à l’Espagne via la Méditerranée. Si les Émirats réussissent à mettre la main sur 40 % de Naturgy, ils vont se retrouver automatiquement dans le tour de table de Medgaz, ce que l’Algérie ne veut pas.

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