La bataille des mémoires de la colonisation française en Algérie est aussi une bataille des « rues ». Des lieux publics en France sont baptisés ou débaptisés suivant la couleur idéologique des dirigeants de la ville.
Alors que la ville de Toul a érigé fin octobre une statue du général Bigeard, tortionnaire pendant la guerre d’Algérie, la ville de Paris annonce qu’une plaque explicative de la « rue de Laghouat » sera dévoilée en souvenir du massacre commis dans cette ville du sud algérien pendant la conquête de l’Algérie par l’armée coloniale française.
Le massacre de Laghouat a eu lieu en 1852. Alors que les troupes françaises fonçaient vers le grand sud de l’Algérie, elle a fait face à la résistance de la ville de Laghouat, aux portes du désert (400 kilomètres au sud d’Alger).
Après un siège de plusieurs jours, les généraux Pélissier, Vantini et Bouscaren ont donné l’ordre à leurs troupes, composées de 6000 soldats, de prendre d’assaut la ville. C’était le 4 décembre 1852. Les deux tiers de la population de la ville, estimée à 4500 habitants ont été décimés.
Les massacres qui se sont poursuivis même après la prise de la ville ont fait précisément 3786 morts. Les enfants, y compris les filles, n’ont pas été épargnés.
Algérie – France : une plaque à Paris en souvenir du massacre de Laghouat à Paris
Le massacre est considéré par les historiens comme « le premier Holocauste de l’histoire des guerres », à cause du nombre élevé de victimes proportionnellement à la population ciblée et de l’utilisation de procédés d’extermination comme le gaz et des obus chargés de chloroforme.
Le 4 décembre prochain, soit 172 ans jour pour jour après ce massacre, une plaque commémorative et explicative de la « rue de Laghouat », sera dévoilée dans le 18e arrondissement de Paris.
L’initiative est prise par la maire de Paris Anne Hidalgo, de son adjointe chargée de la mémoire et du monde combattant Laurence Patrice et du maire du 18e arrondissement de la capitale française, Éric Lejoindre.
« Cette rue porte la mémoire de la population de cette ville algérienne de Laghouat dont l’armée coloniale française massacra plus des deux tiers des habitants en 1852 », lit-on dans l’invitation lancée par la mairie de Paris.
Cette rue porte le nom de Laghouat depuis 1864. Il était de tradition à l’époque que des lieux publics en France soient baptisés du nom de batailles et conquêtes coloniales. Auparavant, depuis 1841, elle s’appelait rue de Mazagran, en souvenir du siège de Mazagran en Algérie, en 1840.
C’était donc un hommage aux bourreaux et pas aux victimes. La plaque explicative qui sera dévoilée le 4 décembre est destinée à rappeler ce qui s’est passé à Laghouat et à rendre hommage aux victimes.
Cette initiative survient après le déboulonnage du maréchal Bugeaud lundi 14 octobre à Paris. Son nom n’est pas apposé sur cette avenue du 16 arrondissement de la capitale française.