Projet phare du Ramadan 2025, la série télévisée Muawiya suscite une vive polémique et fait l’objet d’interdictions dans plusieurs pays musulmans. Une controverse qui avait commencé avant même sa diffusion.
Une série TV historique sous le feu des critiques
Il s’agit d’un biopic retraçant la vie de Muawiya ibn Abi Sufyan, premier calife de la dynastie omeyyade, dont le règne a marqué la division entre sunnites et chiites.
Dès la diffusion des deux premiers épisodes au début du Ramadan 2025 qui commencé cette année le 1er mars notamment en Algérie et en Arabie saoudite, la série a été interdite dans certains pays et a déclenché de vifs débats dans le monde musulman.
Une production saoudienne à 100 millions de dollars
Muawiya est une superproduction de 30 épisodes, financée par MBC, le géant saoudien des médias, avec un budget estimé à 100 millions de dollars.
Le scénario a été écrit par le journaliste égyptien Khaled Salah et la réalisation confiée au cinéaste américano-palestinien Tarek Alarian, rapporte Middle East Eye.
La série a été tournée aux studios Carthago Film en Tunisie. Elle met en scène plusieurs compagnons du Prophète (QSSL), un choix qui a provoqué de vives réactions.
Des interdictions en Irak et en Iran
Selon le journal Emarat Al Youm, l’Irak a été le premier pays à interdire la diffusion de la série Muawiya. La Commission irakienne des communications et des médias (CMC) a invoqué la nécessité de préserver la paix sociale dans le pays où vit une importante communauté chiite.
« La diffusion de productions historiques controversées peut attiser les tensions sectaires et menacer la paix sociale, particulièrement pendant le Ramadan », a justifié la CMC.
L’Iran a également interdit la série et son doublage, accusant la production de « réinterpréter » la vie de Muawiya ibn Abi Sufyan et de chercher à « réhabiliter la dynastie omeyyade ».
Les autorités iraniennes ont même commencé à supprimer les épisodes diffusés illégalement sur les plateformes en ligne.
Des critiques en Égypte et une réaction d’Al-Azhar
En Égypte, des historiens et des religieux ont vivement critiqué la série Muawiya.
L’écrivain égyptien Youssef Zeidan a dénoncé sur les réseaux sociaux une représentation erronée de l’histoire : « La série montre les Quraysh vivant comme à Rome, alors qu’ils étaient à La Mecque. »
Il critique aussi l’image d’Abu Sufyan, présenté comme un philosophe à la manière de Socrate.
L’institution Al-Azhar, référence du monde sunnite, s’oppose quant à elle à la représentation des compagnons du Prophète (QSSL) à l’écran.
Ramadan 2025 : l’Algérie boude la série TV « Muawiya »
Selon Al-Quds al-Arabi, le Dr Reda Abdelwajed, doyen de la faculté des sciences des médias, estime que ces figures historiques sont sacrées et ne devraient pas être incarnées dans une œuvre dramatique.
Le cheikh Abdelfattah Abdelghani Al-Awari condamne fermement la série, la jugeant « religieusement inacceptable », rapporte Oumma.com.
En Algérie, aucune chaîne TV ne diffuse cette série. La Télévision algérienne n’a pas acquis les droits de diffusion de Muawiya.
Les créateurs de la série défendent leur œuvre
Face aux critiques, le scénariste Khaled Salah a tenu à défendre son œuvre. Sur Facebook, il explique que son intention était de « donner une dimension humaine » au calife omeyyade et d’explorer les enjeux politiques de son époque.
De son côté, la chaîne MBC maintient la diffusion de Muawiya, malgré le tollé qu’elle suscite, et les nombreuses pressions politiques et religieuses.