Après 20 ans d’échanges très déséquilibrés, l’heure de la révision a sonné pour l’accord d’association Algérie – UE. L’Algérie tient à revoir les clauses de ce texte négocié dans la précipitation au début des années 2000, dans une conjoncture économique totalement différente de celle d’aujourd’hui.
Les choses semblent s’accélérer dans ce sens. Quelques jours après une réunion au sommet consacrée au sujet et présidée par le président de la République en personne, le Premier ministre Nadir Larbaoui a reçu dimanche 19 janvier l’ambassadeur de l’Union européenne en Algérie, Diego Mellado Pascua.
Les deux responsables ont passé en revue la coopération et évalué les perspectives des relations bilatérales, “à la lumière de l’accord d’association Algérie-UE” et ont réaffirmé “leur engagement commun à œuvrer de concert en vue d’établir un partenariat global et diversifié marqué par de nouvelles dynamiques, selon une approche équilibrée garantissant les intérêts des deux parties », indique un communiqué des services du Premier ministre.
Larbaoui et Mallado se sont félicités de « la réunion prévue du comité technique bilatéral de concertation sur les relations commerciales entre les deux parties ». La date et lieu de cette réunion n’ont pas été dévoilés.
Ils ont aussi insisté sur « l’importance de la tenue du Conseil d’association Algérie-UE”. Ce sera l’occasion d’évaluer la coopération bilatérale, “dans un esprit d’amitié et d’entente mutuelle, et d’examiner les opportunités de son renforcement et de son développement, en tenant compte du développement que connaît l’Algérie ».
Algérie – UE : réviser l’accord d’association “sans entrer en conflit”
L’Algérie réclame depuis plusieurs années la révision de l’accord d’association avec l’UE dont le caractère déséquilibré se vérifie aisément par les chiffres.
Entre 2005, année de l’entrée en vigueur de l’accord, et 2015, l’Algérie a exporté vers l’UE pour 14 milliards d’euros de marchandises hors hydrocarbures et a importé de cet espace pour 220 milliards d’euros de marchandises, soit une moyenne de 22 milliards d’euros par an.
En 2024, les échanges commerciaux entre l’Algérie et l’Union européenne ont atteint plus de 50 milliards d’euros.
Le démantèlement tarifaire prévu par l’accord a fait perdre à l’Algérie des sommes colossales en droits de douane, 700 milliards de dinars.
Accord d’association : l’Algérie veut faire une place à ses produits en Europe
La principale retombée de l’accord est la levée des droits de douane pour les produits européens. La “prospérité partagée” des deux rives de la Méditerranée promise par le processus de Barcelone lancé en 1995 n’est pas au rendez-vous.
Au moment de la négociation de l’accord, l’Algérie n’avait pratiquement pas de produits, hormis le gaz et le pétrole bruts, à placer sur le marché européen.
La situation est toutefois en train de changer à la faveur des efforts du pays pour diversifier son économie et ses ressources.
En Algérie, l’agriculture et l’industrie manufacturière font mieux qu’il y a vingt ans et les exportations hors hydrocarbures ont triplé par rapport à leur niveau de 2017.
L’objectif de l’Algérie est de les porter à 29 milliards de dollars en 2030, et veut que l’Union européenne ouvre son marché à davantage de produits industriels et agricoles algériens.
Alger veut obtenir de Bruxelles la levée des restrictions et la hausse des quotas imposés pour les produits algériens.
L’épisode de la pâte à tartiner El Mordjene qui a été interdite en France sur la base d’un règlement européen a dévoilé les restrictions, parfois arbitraires, dont sont victimes les produits algériens en Europe.
Le président Abdelmadjid Tebboune a souligné dès 2021 la nécessité de réviser l’accord d’association liant l’Algérie à l’Union européenne. Le chef de l’État veut une renégociation clause par clause pour parvenir à un partenariat gagnant – gagnant.
En ce début 2025, l’Algérie est passée à la vitesse supérieure. Lundi 13 janvier, le président de la République a présidé une réunion destinée à suivre l’état d’avancement des préparatifs pour la révision de l’accord.
En octobre dernier, il avait annoncé que la révision aura lieu en 2025, précisant toutefois que cela se fera avec “souplesse”, dans “un esprit amical” et sans ”entrer en conflit”. L’argument principal de l’Algérie est que sa transformation économique devra être prise en compte.
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