L’Italie est le pays d’Europe qui a le plus échangé les visites de haut niveau avec l’Algérie ces dernières années. C’est le signe que le modèle de coopération gagnant-gagnant initié par Alger et Rome marche. Portée par l’énergie, la coopération bilatérale déborde peu à peu sur d’autres segments de l’économie.
C’est d’abord le fruit de l’entente politique entre les dirigeants des deux pays, au moment où les contingences politiques et les résurgences du passé font perdre chaque jour à la France du terrain en Algérie.
Antonio Tajani, le ministre italien des Affaires étrangères et vice-président du Conseil des ministres, est arrivé à Alger lundi 3 mars. Pour la presse italienne, la visite vise à franchir une nouvelle étape dans le partenariat économique avec un pays au potentiel immense.
“La mission de Tajani en Algérie consolide les relations avec un pays qui peut offrir de grandes opportunités”, titre Agenzia Nova.
Pour l’agence de presse italienne, le message qui ressort du déplacement en Algérie du numéro deux du gouvernement italien est que “dans un contexte international complexe au niveau commercial, le renforcement de la coopération avec des pays comme l’Algérie, avec lequel la collaboration est déjà très forte dans le secteur énergétique, pourrait représenter une opportunité pour l’Italie”.
“L’énergie, les infrastructures, les transports et la sécurité sont les thèmes clés de la visite, avec une attention particulière portée à la transition verte et à la sécurité énergétique”, écrit pour sa part le site La Milano.
L’Algérie est le principal fournisseur de gaz de l’Italie, couvrant 39 % de ses besoins. Après le déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022, l’Algérie a répondu favorablement à la demande de Rome d’augmenter ses livraisons de gaz.
Les deux pays sont reliés par un gazoduc, le Transmed, et un deuxième ouvrage similaire, le Galsi, est en projet. L’Algérie et l’Italie sont en outre engagées dans un mégaprojet de fourniture d’hydrogène vert, incluant également l’Allemagne et l’Autriche, avec le projet SoutH2 Corridor.
“Nous avons besoin d’avoir des pays amis qui nous permettent d’avoir le gaz dont nous avons besoin pour nos entreprises. Il y a une excellente relation de ce point de vue”, a déclaré le chef de la diplomatie italienne qui a rencontré à Alger son homologue algérien Ahmed Attaf et le ministre de l’Énergie Mohamed Arkab. Le chef de la diplomatie italienne a été reçu par le président de la République Abdelmadjid Tebboune.
Algérie – Italie : passé apaisé et forte volonté politique
L’Algérie et l’Italie veulent néanmoins aller au-delà du gaz, comme convenu lors des nombreuses visites de haut niveau ces dernières années.
“Nous sommes un gros client de l’Algérie, le commerce est d’une grande importance, nous voulons continuer à exporter, pas seulement à importer. Nous exportons principalement des machines, nous devons faire davantage”, a dit l’adjoint de Giorgia Meloni.
Tajani est accompagné de dirigeants de grandes entreprises italiennes, comme le géant énergétique ENI, gros investisseur dans le secteur des hydrocarbures algérien. Une table ronde d’affaires est aussi inscrite au menu de la visite.
Outre la vente de gaz et l’importation de machines, entre l’Algérie et l’Italie, c’est aussi de l’investissement direct.
La venue du ministre italien intervient quelques jours après le lancement effectif d’un mégaprojet céréalier algéro-italien dans le sud algérien.
Le groupe italien BF produira en effet du blé et des légumes secs sur une surface de 36 000 hectares à Timimoun pour un investissement de plus de 400 millions de dollars. Un investissement qui s’ajoute aux nombreux autres projets italiens concrétisés, comme l’usine FIAT ouverte à Oran fin 2023.
Ce fort partenariat est surtout le fruit d’une forte volonté politique et d’une stratégie. L’Algérie fait partie du plan Mattei de renforcement du partenariat avec la rive sud de la Méditerranée et l’Afrique, lancé par Giorgia Meloni en janvier 2024 et baptisé du nom de l’industriel Enrico Mattei, ancien PDG d’ENI et ami de la révolution algérienne.
Lors d’un récent débat au Sénat français sur la crise avec l’Algérie, le sénateur d’origine algérienne Akli Mellouli a souligné que la France se faisait doubler en Algérie par l’Italie avec son plan Mattei.
“Nous avons affaire à des relations qui sont compartimentées et flexibles et l’Italie joue le jeu de cette flexibilité. Le fait d’appeler ce plan Mattei, c’est révélateur. Parce que Mattei, c’est le soutien au FLN et à l’indépendance algérienne, c’est effectivement ainsi que ça raisonne en Algérie et en Afrique du Nord”, a expliqué au cours du même débat l’universitaire Adlene Mohammedi.
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