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Sommet extraordinaire arabe sur Gaza : ce que prévoit le plan égyptien

C’est le grand paradoxe du sommet arabe d’urgence sur Gaza qui s’ouvre ce mardi 4 mars au Caire : autant il se veut comme une riposte unifiée des pays arabes au plan de Donald Trump de vider l’enclave palestinienne de ses habitants, autant il survient sur fond de divisions et de divergences d’approche sur la recherche d’une solution au conflit palestinien.

Ce sommet, convoqué suite à la proposition du président américain de déplacer les 2, 5 millions d’habitants de Gaza, dévastée par la guerre plus d’une année durant, vers notamment l’Égypte et la Jordanie, devrait examiner une proposition égyptienne de reconstruction de la bande de Gaza.

Cette proposition se veut comme une alternative à la proposition américaine qui s’aligne sur la vision de la droite israélienne.

Révélé il y a quelques jours par le journal émirati The National, le plan égyptien se décline en trois phases s’étalant sur cinq ans.

Avenir de Gaza : les pays arabes étalent leurs divisions

Dans une première phase, d’une durée de six mois, il s’agit d’aménager trois zones humanitaires pour reloger temporairement, dans des tentes et des logements mobiles, les Gazaouis sinistrés et restaurer des services essentiels comme l’eau, le gaz et l’électricité.

La deuxième phase, dédiée à la reconstruction et s’étalant sur trois à cinq ans, prévoit la construction de bâtiments et les infrastructures de base avec au préalable l’organisation d’une conférence internationale pour lever les fonds nécessaires à la reconstruction estimée par l’ONU à plus de 53 milliards de dollars.

Les observateurs s’attendent à ce que les monarchies du Golfe soient les premiers bailleurs de fonds pour la reconstruction de Gaza.

Quant à la troisième phase, elle consiste à lancer un dialogue politique pour promouvoir la solution à deux États.

Selon le politologue Abdelalim Mohamed, cité par le journal « Ahraminfo », la vision égyptienne comprend deux aspects : le premier est la formation d’un comité palestinien pour gouverner la bande de Gaza sans la participation du Hamas, dans le but d’unifier la géographie de l’État palestinien.

Quant au deuxième aspect, il consiste à assurer la sécurité à travers le déploiement de forces arabes pour assurer l’ordre jusqu’à ce que l’Autorité palestinienne soit prête à gérer la bande de Gaza.

Mais d’ores et déjà ce sommet ne s’annonce pas sous de meilleurs auspices. À commencer d’abord par la défection de nombreux chefs d’États dont les présidents algérien, Abdelmadjid Tebboune et tunisien, Kais Saied.

Alger qui a décidé de dépêcher son ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, explique que la décision du président Tebboune de ne pas se rendre au Caire, « intervient dans le contexte des déséquilibres et des lacunes qui ont entaché le processus de préparation de ce sommet, dans la mesure où ce processus a été monopolisé par un groupe limité et étroit de pays arabes qui ont accaparé la préparation des outcomes du prochain sommet du Caire sans aucune coordination avec le reste des pays arabes, qui sont tous concernés par la question palestinienne ».

L’allusion ici à la rencontre de Ryad, tenue le 21 février dernier en présence seulement de représentants de haut rang des pays du Golfe, de l’Égypte et de la Jordanie, ne souffre d’aucune équivoque.

Seulement huit pays étaient conviés sur les 22 que compte la Ligue arabe à cette rencontre. Des pays qui, pour l’essentiel, ont normalisé leurs relations avec l’État Hébreu.

Sommet arabe extraordinaire sur Gaza : l’Algérie mécontente

« Le président de la République éprouve un sentiment d’insatisfaction par rapport à cette façon de faire, basée sur l’inclusion de pays et l’exclusion d’autres, comme si le soutien de la cause palestinienne était devenu aujourd’hui le monopole de certains et pas d’autres », a indiqué l’agence officielle algérienne APS citant une source informée.

L’Algérie, qui n’a ménagé aucun effort pour soutenir la cause palestinienne avec notamment le sommet arabe d’Alger puis par une grande activité diplomatique au sein du conseil de sécurité de l’ONU depuis l’éclatement de la guerre à Gaza, affirme qu’elle n’a pas été associée à plusieurs aspects des préparatifs de ce sommet.

C’est pourquoi elle n’hésite pas à affirmer qu’elle se « lamente et déplore l’état actuel de la nation arabe ».

Aussi, ce sommet d’urgence de la Ligue arabe du Caire sera confronté à plusieurs défis.

Le premier et non des moindres est l’attitude américaine et israélienne, garants de l’arrêt de la guerre et des points de passage pour les aides humanitaires.

Quand bien même les États-Unis ont exprimé leur disponibilité à examiner une solution alternative à la proposition de Trump, il n’en demeure pas moins qu’ils auront leur mot à dire notamment sur la gestion politique de l’après-guerre à Gaza.

Autre défi : l’acceptation ou non du plan par le mouvement Hamas. Principal mouvement dans la bande de Gaza, le Hamas qui jouit d’une certaine bienveillance dans certains États arabes n’est visiblement pas prêt à lâcher la proie pour l’ombre.

Avenir de Gaza : le Hamas met en garde

Dans une lettre adressée aux participants au sommet de ce mardi, publiée samedi, le Hamas s’est dit prêt à considérer « toute option acceptée par les Palestiniens » mais qu’il rejette « catégoriquement toute tentative d’imposer des projets ou des formes d’administration non palestiniennes ou la présence de forces étrangères sur le territoire de la bande de Gaza ».

Une sortie qui coïncide avec la fin de la première phase de la trêve et dont la poursuite risque d’être compromise en raison des désaccords entre Israël et le mouvement concernant la suite du processus devant mener à l’arrêt total de la guerre.

Des désaccords qui font planer de nouvelles menaces dans cette région martyrisée. C’est dire que peut-être le destin de la ligue arabe se joue ce mardi au Caire à l’aune des résultats attendus et des défis qu’elle devra surmonter.

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